
PORTRAIT KREATIV
Amaury Cornut : guitare en action
Avec Amaury Cornut, la guitare n’est plus l’instrument dont les cordes vibrent sous les doigts de son joueur. Avec Gryphée, nom du prototype qu’il actionne à distance, la guitare prend son autonomie. L’instrument joue le premier rôle, l’artiste est en arrière plan. Le résultat : une musique expérimentale aux harmonies motorisées.
Je suis incapable de jouer la musique des autres.
De la rockstar, Amaury Cornut en a le look, mais pas l’attitude. Il avoue avoir commencé la musique assez tard. A 15 ans, il prend ses premiers cours de guitare mais arrête vite après en avoir retenu les bases. « Je suis incapable de jouer la musique des autres » déclare-t-il, avec l’humilité d’un artiste qui ne se reconnaît pas un talent d’interprète. Par la suite, Amaury Cornut intègre deux groupes locaux, Elizabeth III d’inspiration plutôt pop et Binary tree, groupe de musique expérimentale. Déjà, il développe l’idée de mettre la musique au centre des attentions : dans les concerts, les spectateurs sont face à un mur d’images, les musiciens dans leur dos. Les concessions du travail en groupe l’amèneront à se lancer en solo pour réaliser son œuvre à lui, son « truc » comme il l’appelle.
Maestro, moteurs !
Le projet Gryphée revisite la guitare. L’instrument de base est métamorphosé : les cordes et les sons sont transformés. Un moteur est placé à des endroits stratégiques de la guitare pour obtenir des sons inédits. « Elle ne donne jamais les mêmes ondes. Elle fonctionne toute seule ». Le musicien s’efface derrière son instrument, sans disparaître : « Je suis dans l’ombre de la guitare mais les gens se posent la question du concepteur, je ne suis pas complètement oublié ». Une telle mise en scène interroge les perceptions de la musique : la place de l’artiste et l’écoute s’en trouve bouleversée. Le projet Gryphée a été signé chez le label de musiques expérimentales autrichien, Isolationism record. L’album se compose d’une piste unique de 26 minutes, baptisée « les rondes abiment ». Le morceau est séparé en deux parties : l’une avec intervention humaine sur l’instrument par modulation de la vitesse des moteurs et gestion en direct des fréquences sonores, puis une autre, où la guitare joue seule, comme en parfaite improvisation. Ses moteurs rentrent en résonance, chantant variations et harmonies.
Gryphée n’est pas un rendez-vous avec la mélodie
« Ma vision de la musique réside dans le métissage des arts. Dans les arts actuels, il n’y a plus vraiment de séparation, il n’y a plus de grandes thématiques. Le cinéma, le son, les effets, tout est mêlé. ». Amaury voit la musique comme un grand voyage où chacun se laisse transporter par des images et par des sons méconnus. Loin des conventions et des normes admises, Gryphée n’est pas un rendez-vous avec la mélodie. C’est une rencontre avec une guitare, une expérience sensorielle où le bruit des moteurs crée l’harmonie des sons. C’est une rencontre avec un artiste-machiniste d’un spectacle, où la lumière est dans l’ombre.
Marianne Guéry et Marion Le Duc, M1 Information et Communication, Université de Nantes
Crédits photos : Adrien Lanzinger et Miguel Raballand
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