
PORTRAIT KREATIV
Jean Berliet : écrivain (sur)réaliste
Écrivain autodidacte de 23 ans, Jean Berliet, se définit comme un artiste « réaliste dans un monde qui a des aspects parfois bien étranges  ». Passionné de science-fiction, ce jeune jurassien d’origine, se nourrit également de surréalisme. Un genre qui lui permet d’utiliser son imagination débordante pour sortir du quotidien. Et nous faire réfléchir sur la société d’aujourd’hui.
Il est 10h31 ce mardi 9 novembre 2010 à l’horloge de la gare Sud de Nantes. C’est le lieu choisi par Jean Berliet pour me rencontrer. Une gare, quoi de plus naturel pour quelqu’un qui n’aime pas rester en place et qui traverse la France pour trouver l’inspiration. Que ce soit en stop, en bagnole avec des potes, à pied, à vélo ou en train. « Écrire, c’est aussi vivre pleinement sa vie », me confie-t-il. Comme un peintre a besoin de sortir de son atelier, l’écrivain ne peut pas rester seul chez lui devant sa feuille. « Les gares et les aéroports sont des lieux de passage donc d’histoire… et d’histoires à raconter. Une gare ne dort jamais ». Le décor est planté. Embarquement immédiat.
Une inspiration sans limites
Le voyage ? Fuir pour mieux se construire. Partir pour mieux revenir. (…) Nous sommes les nomades des temps modernes. (En route pour l’aventure)
« Je me définis par les mots, leur sens et leur portée. Qu’on les écrive, qu’on les joue ou qu’on les chante ». Friand de changement, Jean Berliet n’a donc pas de genre littéraire particulier et son inspiration n’a pas de constantes. Il s’agit plutôt d’une pulsion qu’il traduit en poèmes, scénari, poésies, chansons, romans ou nouvelles. « Mon imagination travaille en permanence », reconnaît il. « Je suis, non pas hanté, mais habité par ce que j’écris ». Une simple rencontre ou un vague souvenir peut ainsi servir à créer une histoire ou une situation. « Il faut tout de même une trace de réel », corrige t-il. « Nous sommes des êtres réels… jusqu’à preuve du contraire ». La vie, ses incompréhensions et ses fatalités, la mort, l’amour : ses textes sont en effet imprégnés de ces sensations bien réelles. Du vécu, aussi : « Même dans une histoire surréaliste, le héros reste terrestre. Il a un minimum les pieds sur terre pour pouvoir comprendre son environnement et pouvoir s’y battre. Pour moi, le surréalisme, c’est aussi une manière de rêver, de fantasmer et de se créer un monde idéal ».
Je me rappelle le bruit des pages que l’on tourne, l’odeur du papier qui traduit son âge, sa couleur grise ou jaunie, le toucher de cette matière divine. (Kunyugama)
Mais n’y aurait-il pas un message caché derrière tout cela ? « Je n’écris pas des équations ou des mots qui ne veulent rien dire », affirme-t-il. « Les mots ont leur sens. Mes œuvres ont une portée contestataire, de remise en cause, de rébellion vis-à-vis de certaines parties de la société ». Une société de consommation qu’il critique avec humour dans le chapitre 13 de son recueil Acide à toutes les sauces. Intitulé Consomme, marche ou crève, le héros y égratigne « le fabricant de meubles suédois surstéréotypés en bois de qualité discutable » chez qui on peut acheter « le dernier bibelot à la con mais à la mode ».
L’écriture, un véritable dédoublement de personnalité
Son maître à penser, c’est Boris Vian. « Un homme qui savait particulièrement bien rendre ses personnages humains, plein de doutes et de sentiments dans un monde complètement barré, notamment dans l’Arrache-Cœur ou dans l’Écume des Jours ». Une référence dont il s’est d’ailleurs inspiré pour choisir son pseudonyme, Berliet, anagramme du mot Liberté, afin de se mettre plus facilement dans la peau de ses personnages. Boris Vian avait en effet utilisé plusieurs pseudonymes, anagrammes de son propre nom (comme Baron Visi) et avait écrit son premier roman sous le nom de Vernon Sullivan.
Les mômes courent après l’âge adulte. Nous, on donnerait n’importe quoi pour retourner en enfance. (Gamin Rebelle)
Cependant, cette forme de détachement par rapport à ses textes, écrits à la première personne, n’explique qu’en partie ce choix. « Je ne me reconnais pas dans mon nom et mon prénom civil », confesse l’écrivain. « Jean Berliet, c’est moi quand j’écris. C’est une autre personnalité, une autre image de moi qui se différencie de la vie civile. Probablement une forme de schizophrénie ». Et c’est cette alchimie qui pousse Jean Berliet à poursuivre son aventure surréaliste dans le monde de l’écriture. En attendant de voir un jour ses œuvres publiées. « Ça fait du bien d’être reconnu en tant qu’artiste et de se sentir écouté », glisse-t-il timidement à la fin de notre entretien. Avant de monter dans le train en direction de Saint-Amour, sa ville natale.
Christophe HERLÉDAN, M1 Information et Communication, Université de Nantes
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