
Animé par le désir de changer les mentalités
Hass Mosa met son talent au service de son engagement
On le surnomme le “phénomène reggae des Comores”. Hass Mosa a choisi Nantes comme ville d’adoption. Fondateur du groupe Djama en 1993, ce franco-comorien poursuit désormais sa carrière en solo. L’auteur compositeur interprète vient d’ailleurs de sortir un nouvel album “Changer”. L’occasion de présenter un artiste authentique, un messager de la paix. L’occasion aussi pour cet homme doté d’une grande spiritualité de témoigner sans langue de bois.
Figure engagée ? chanteur militant ? Hass Mosa est tout simplement un artiste investit d’une mission : enseigner en musique l’histoire de son pays. Pour éveiller les esprits, il prône la philosophie du reggae et communique des valeurs morales, comme le respect et la tolérance. CHANGER. Sept lettres apposées sur son nouvel album. Quatorze titres qui puisent leur inspiration dans l’histoire des Comores et de son île d’Anjouan. Un récit marqué par la mainmise coloniale, le pouvoir métropolitain et les crises politiques. Une adolescence rythmée par l’indépendance, les coups d’état, la dictature, la quête de liberté. Les souvenirs d’un gamin de 15 ans à jamais gravés dans la mémoire. « De ma fenêtre, j’ai assisté à l’arrivée des militaires, apeuré par le vrombissement des hélicoptères et le bruit des explosions. On aurait dit un “remake” du film Les Sept Mercenaires. À cette époque, j’étais conscient de la guerre mais pas de l’histoire qui se tramait devant mes yeux. La colonisation a mis le pays dans le chaos, a entraîné la perte de notre identité, la disparition de nos richesses. » Sans haine, ni révolte, l’enfant du pays se remémore ces moments qui l’ont conduit à fuir, à quitter ses racines laissant amis et famille derrière lui.
Je n’ai pas encore compris comment la musique a guidé mon chemin. De plus en plus, elle me permet d’exister, de trouver mon équilibre.
Hass Mosa n’a que 19 ans lorsqu’il arrive en France. « J’étais parachuté, dit-il, sans argent, sans reperds. » C’est en puisant sa force dans le reggae qu’il a entamé une reconstruction personnelle, son deuxième combat. Dès lors, la musique va accompagner son quotidien et devenir son terrain d’expression. « Je n’ai pas encore compris comment la musique a guidé mon chemin. De plus en plus, elle me permet d’exister, de trouver mon équilibre. Elle vibre en moi. » Très tôt déjà, il prend conscience que sa destinée se poursuivrait sur scène. La consécration a lieu en 1986 avec la sortie de son premier vinyle avant de fonder, six ans plus tard, le groupe Djama. S’ensuivent quatre albums, de nombreuses compilations et plus de 600 concerts. Puis, vient le temps de la réflexion, du besoin d’expression. Hass Mosa décide de continuer en solo. Nous sommes en 2006.
Aujourd’hui, l’artiste poursuit son combat pour l’égalité des hommes. Ses sources d’inspiration ? Martin Luther King, Nelson Mandela, Bob Marley, Mahatma Gandhi… Autant de noms qui résonnent dans ses chansons Bam Bam Remix et Célébration, tel un hommage à ceux qui ont milité pour la paix et la liberté. Il prend à bras le corps leurs paroles et met, à son tour, sa pierre à l’édifice afin d’apporter sa contribution. Chacun de ses mots pénètre l’âme. Et pour cause. Six années de réflexion, de méditation, de pensée ont été nécessaires à la préparation de ce nouvel album. Période durant laquelle Hass Mosa a pris un soin tout particulier à écrire son histoire et transmettre ses émotions. Tout simplement partager la sensibilité qui est sienne. Il marie subtilement la langue de sa terre d’accueil et de son île natale, le swahili. Le tout est nourri de sonorités reggae, parfois arabisantes. Un métissage culturel et une pluralité d’influences que Hass Mosa dénomme ainsi : Reggae tribal made in Comores.
Je dois parler
À chacune de ses prestations, l’artiste sème son message. Mesure-t-il la portée de ses textes ? « Incontestablement », répond-il. « Lorsque je regarde le public, je sais qu’il ressent mes paroles. Alors, la magie s’opère. » Sur scène, l’homme devient autre. « Un sentiment très étrange et profond à la fois », décrit-il. « Je suis comme happer par une force spirituelle. » Un bâton à la main, il délivre son message d’unité. Chaque concert prend des allures mystiques, sorte de prière collective.
Désormais, Hass Mosa ne pèse plus ses mots. « Je dois parler », lance-t-il. Un brin révolutionnaire, l’artiste pointe du doigt un système répressif. « Aujourd’hui encore, je suis considéré comme un inconnu. La discrimination fait partie de mon histoire. Des portes restent fermées. » Non sans persévérance, il poursuit sa route. Il se produira le 24 avril à Saint-Aignan-de-Grand-Lieu (44) lors du festival “Parfum Caraïbes”, le 8 mai à Trélazé (49) pour un concert reggae, le 5 juin à l’occasion du festival Les Arts O’Zeurs d’Eté à Nozay (44). Sans oublier le 28 août pour le concert Roots Land dans l’Aquitaine (33) et le 11 septembre pour le festival “Viens chercher bonheur” à Meigné-le-Vicomte (49).
Et, en toute confidence, Hass Mosa avoue qu’un autre album est d’ores et déjà en réflexion, dédié cette fois-ci à celles qu’il nomme « les grandes dames de sa vie ». Ces femmes qui, au même titre que la musique, ont fait de lui l’artiste et l’homme qu’il est aujourd’hui. En somme, un album qui promet d’être, certes, plus sentimental mais toujours aussi personnel.
Texte et photo d’ouverture : Florence FALVY
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