
Festival de Saint Céré 1/2
« Papageno est l’un des rôles que tout jeune baryton rêve de jouer  »
Aperçu de la soirée du 03 Aoà »t : “La Flà »te enchantée”
Pour sa 29° édition, le Festival de musique classique de Saint Céré (Lot), du 25 Juillet au 15 Aoà »t 2009 a jeté des ponts entre Mozart et Piazzolla, Kurt Weil et Verdi. Le 03 Aoà »t, rencontre avec avec Raphaë l Brémard et Christophe Gay, Tamino et Papageno de “La Flà »te enchantée  ».
En prélude à une tournée prévue pour cette saison 2009-2010, le festival de Saint Céré a proposé sept représentations de “La Flûte enchantée”, dans le cadre grandiose du château de Castelnau. Les artistes s’emparent de toutes les possibilités offertes par le lieu et, dans la mise en scène très poétique, pleine d’énergie et de vie, d’Eric Perez, ils portent un spectacle ludique et lumineux, d’un bout à l’autre. Au sein d’une troupe homogène et attachante, Raphaël Brémard apporte à la quête d’absolu du prince Tamino un jeu d’une belle intériorité et une voix riche en nuances. Il rend compte, en particulier, du cheminement du personnage, qu’il achève radieux, comme habité par une vive lumière. Christophe Gay est totalement extraverti en Papageno, d’un investissement scénique total et sincère. Patrick Schramm sculpte la figure de Sarastro grâce à un timbre profond et caverneux et le visage d’un ange rédempteur. L’émotion d’une telle soirée tient aussi à l’écoute du chef d’oeuvre de Mozart, dans le charme impalpable d’une nuit d’été, où les vocalises aériennes de la reine de la nuit semblent l’écho du chant des oiseaux.
FRAGIL : Ce qui frappe dans cette “Flûte enchantée”, c’est l’esprit de troupe et la vie intense qui règne sur scène. Comment vivez vous ce spectacle ?
RAPHAËL BRÉMARD : Les répétitions se sont effectivement très bien passées et nous sommes parvenus à une réelle osmose entre tous les artistes. Une telle homogénéité est certainement due au fait que nous sommes tous à peu près du même âge et qu’il s’agit, pour chacun, d’une prise de rôle, sauf pour les interprètes de Sarastro et de la reine de la nuit. Eric Perez, le metteur en scène et Joël Suhubiette, le chef d’orchestre, ont largement contribué à cette bonne ambiance de travail et l’idée de constituer une troupe leur tenait à coeur.
CHRISTOPHE GAY : Le cadre du festival est très familial. Nous mangeons ensemble, partageons des colocations. Il s’agit donc d’une vraie aventure. De plus, la tournée prévue la saison prochaine est un bon tremplin et nous met dans la perspective de nous retrouver. Il y aura quelques nouveaux interprètes, d’où un nouveau brassage mais l’état d’esprit sera le même. Même si on se demande comment cela va vivre, on sait qu’il y aura toujours cette liberté et cette convivialité, où chacun est là au même titre, pour travailler, que l’on soit chanteur ou technicien.
FRAGIL : Tamino et Papageno sont, pour chacun, des prises de rôles. Comment avez-vous construit ces personnages ?
Christophe Gay est totalement extraverti en Papageno, d’un investissement scénique total et sincère. Patrick Schramm sculpte la figure de Sarastro grâce à un timbre profond et caverneux et le visage d’un ange rédempteur
RAPHAËL BRÉMARD : Tamino est un monde à lui tout seul. Je suis heureux d’aborder ce personnage dans cette structure qui m’offre la patience nécessaire pour trouver mes repères. Nous avons répété plus d’un mois, ce qui est confortable. La vision du rôle est très intérieure et, avec Éric, nous avons exploré plusieurs directions pour le rendre le plus naturel et le plus humain possible. J’ai abordé Mozart en 2007, avec Bastien de “Bastien et Bastienne”. Bastien ressemble davantage à Papageno. Il vit dans l’instant et ne se pose pas de questions. Tamino n’a rien à voir. C’est un rôle difficile à interpréter qui joue sur la réserve et sur l’introversion. De plus, il se pose des questions existentielles. Je suis moi même passé par des doutes en construisant ce personnage.
CHRISTOPHE GAY : Papageno est l’un des rôles que tout jeune baryton rêve de jouer. C’est un personnage beaucoup plus proche des spectateurs, chacun se reconnaît en lui, ce qui rend possible une grande connivence et le rend plus facile à incarner que Tamino. Il éprouve des choses très concrètes et a les faiblesses que nous avons tous. De Mozart, j’ai chanté Gugliemo de “Cosi fan tutte”, dans une mise en scène de Yves Beaunesne. J’adore cet opéra, complètement intemporel. Gugliemo est apparemment monolithique et rempli de certitudes. J’aime jouer la cassure de ce personnage qui s’écroule et ne s’en remet pas. Pour cette “Flûte enchantée”, Éric, le metteur en scène, est parvenu à nous faire entrer dans sa vision par une grande écoute. Nous avons des idées assez proches sur Papageno et sur la façon dont nous voulons le faire évoluer.
FRAGIL : Quelles ont été les rencontres marquantes de vos carrières ?
CHRISTOPHE GAY : Jean François Sivadier, avec qui j’ai joué dans “Madame Butterfly” (2004) et “Wozzeck” (2007) a été très important. J’ai appris mon métier en le regardant travailler et en regardant mes partenaires. C’est quelqu’un de précieux pour aborder le jeu et pour jouer vraiment. L’un des rôles forts que j’ai abordés a été “Der Kaiser von Atlantis” de Viktor Uhlman, à Nancy en 2004, dans une mise en scène de Charles Tordjman. C’est un opéra qui a été composé au camp de Terezin en 1942, une fable qui dénonce toute dictature. La fin en est dérangeante : l’empereur tyran a une fin rédemptrice et sa mort est, musicalement, l’un des moments les plus beaux de l’opéra. Le compositeur est mort en 1944, à Auschwitz...
RAPHAËL BRÉMARD : Les rencontres, dans ce métier, sont essentielles et elles ont des effets “boule de neige”. Ainsi, Marie-Paule Nounou, chef de chant à Montpellier, a déclenché ma vocation et le ténor Gilles Ragon m’apporte toujours énormément au niveau de la technique vocale. Chanter à Montpellier m’a permis de participer à une production de “Carmen” au festival de Glyndebourne et de chanter au festival de Spoleto. Je suis quelqu’un qui doute énormément et j’exerce un métier où l’on a sans cesse besoin d’être mis en confiance. J’ai la chance d’être bien entouré, par des gens qui croient en moi.
FRAGIL : Quels sont vos projets et y-a-t’il des rôles que vous aimeriez aborder ?
RAPHAËL BRÉMARD : Je vais reprendre à la rentrée deux rôles du “Chevalier à la rose” de Richard Strauss qui auraient dû être tenus par Christian Jean, récemment disparu, à l’opéra de Marseille. En 2010, je vais être Monostatos dans une mise en scène de Peter Brook de “la Flûte enchantée”, aux Bouffes du Nord et en tournée mondiale à New York, Londres et Milan. En juin 2010, je vais participer à l’opéra de Lille à “Carmen”, dans une mise en scène de Jean François Sivadier. Pour le reste, je me laisse guider par la confiance qu’on me porte.
CHRISTOPHE GAY : Pour moi, 2009 est une belle année puisque je vais reprendre en tournée deux beaux rôles mozartiens, Papageno et Gugliemo Je vais aussi chanter Frédéric dans “Lakmé” de Léo Delibes à Rouen à la rentrée puis Morales de “Carmen” à Toulon et enfin “Le roi Arthur” avec Christophe Rousset à Toulouse et salle Pleyel à Paris. Le rôle de Harlekin de “Ariane à Naxos” fait partie de ceux que j’aimerais aborder mais je suis patient et je ne veux pas brûler les étapes. Il faut laisser à sa voix le temps d’évoluer.
Christophe Gervot
Photos : Nelly Blaya
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