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Syndicalisme made in USA

Publié le 9 juin 2004

Pascal Couffin


Francis Feeley, syndicaliste et universitaire, enseigne l’Histoire sociale des Etats-Unis et de la France sur les campus français et américain. C’est avec passion, qu’il répond àquelques questions sur les origines et évolutions du syndicalisme aux Etats-Unis

Retrouvez l’émission « Histoires d’ondes » consacrée à Francis Feeley sur le site de la radio Jet Fm à la rubrique grille des programmes.

-  Comment sont nés le mouvement social et les premières grèves aux Etats-Unis ?

Les premières grèves datent du 18ème siècle. La période moderne a commencé au 19ème siècle après la guerre de sécession ; il y avait 4 syndicats au niveau national. De violentes grèves ont éclaté dans les années 1870. Notamment en Pennsylvanie parmi les mineurs des mines de charbon où l’on comptait 22000 mineurs d’origine irlandaise et parmi eux, plus de 5000 enfants âgés de 7 à 15 ans. Les propriétaires de ces mines n’avaient pas voulu investir dans la protection des ouvriers. A cause des gaz toxiques, des éboulements… plus de 150 mineurs étaient tués chaque année et plus de 300, blessés ou mutilés.

-  Cette lutte a donc pris son essor au milieu du 19ème siècle. Est ce que les prémisses de ces luttes sont enracinées dans les luttes des esclaves noirs américains ?

L’inspiration du mouvement ouvrier est venue d’Europe, par les Irlandais qui ont immigrés et ont lutté contre l’impérialisme britannique. Puis les militants italiens et russes avaient eux aussi une certaine formation idéologique venue de l’Europe. Chez les Irlandais, une organisation « … Mac Guire » était active dans les années 1840 pour lutter contre l’impérialisme britannique en Pennsylvanie. Puis dans les années 1870, une association d’auto défense s’est montée. Ce groupe de vigilance a décidé qu’à chaque fois qu’un mineur serait tué ou blessé, un capitaliste serait lui aussi tué ou blessé. Mais ce type d’association a facilement été pénétré par la Police qui n’a pas hésité à tuer une quinzaine de dirigeants et en tuant les leaders, ils ont détruit le mouvement.

Les grandes grèves de 1877 dans le chemin de fer étaient un danger national car le train traversait le continent d’Amérique du Nord et s’arrêtait dans chaque grande ville. Beaucoup de manifestations se sont élevés contre la formation de monopole capitaliste. Cette grève a été cassée par les militaires. Toutes ces grèves ont éclaté lors de période de dépression économique où le salaire est diminué de 20 à 25% et les travailleurs sont mis à la porte en très grand nombre. Toutes ces grèves ont éclaté à la fin du 19ème siècle. Mais les fermiers ont, eux aussi, été bouleversés par la formation du capitalisme. Pendant ces crises économiques, des milliers de fermiers ont perdu leurs fermes et les familles étaient obligées de tout vendre pour payer les dettes. Des banquiers et assureurs ont tout racheté à très bon marché. Ils ont acheté des centaines de fermes, qu’ils ont industrialisé. Avec l’introduction de fermes industrielles, les gens sont allés, à la fin du siècle, à Chicago travailler dans les usines. A la fin du 19ème siècle des millions de gens se sont regroupés dans des syndicats urbains ou ruraux afin de défier le capitalisme et les classes dirigeantes ont tout fait pour éliminer cette menace démocratique.

-  La guerre de sécession a-t-elle pesée sur ces mouvements ouvriers ?

La guerre de sécession a servi à consolider le capitalisme industriel. La fin de l’esclavage en 1862 et la fin de la guerre en 1865 a représenté une victoire pour les industriels américains. La fin de l’esclavage a introduit une autre forme d’exploitation. Un esclave est traité comme un animal, une propriété privée, tandis qu’un ouvrier est disponible et travaille pour un salaire. S’il n’a pas de travail, il n’a pas de salaire, donc pas de logement, de nourriture, de médicaments. L’esclavage a été remplacé par un système plus vicieux qui a détruit la famille et la culture de résistance. Les syndicats ont accueilli les noirs, ils ont eu une culture qui a exclu le racisme.

-  Dans ces populations opprimées, on compte les ouvriers, les esclaves mais aussi les femmes. La première grève des femmes surgit en 1825 à New York. C’est le premier mouvement où l’on voit les femmes s’impliquer auprès de leurs maris, ouvriers, au niveau des luttes :

Manifester est un désir démocratique, une volonté de changer le système pour qu’il nous convienne. En 1848 apparaissent les mouvements féministes. Le milieu bourgeois et abolitionniste inclut les hommes et les femmes face au racisme. Mais des femmes leaders étaient exclues de certains événements. Cette tradition réactionnaire de supériorité des hommes a continué à l’intérieur de ces mouvements progressistes. Un exemple : en 1840 ont eu lieu des témoignages de mutilations perpétués sur des esclaves noirs. Les hommes n’ont pas voulu montrer cela aux femmes car ce n’étaient pas des images à leur montrer. C’est à ce moment là qu’est né le féminisme. Malgré les gens les plus progressistes, il y avait un sexisme inacceptable et choquant. Il a fallu des années pour le comprendre et en 1888, Kelly Stanton a organisé dans un village au nord de l’Etat de New York, une conférence avec des femmes pour discuter de leur libération. Ce fut un grand succès.

-  Quelles ont été les attaques orchestrées contre le mouvement social aux États-Unis ?

Depuis 1870, les ouvriers dans les rues étaient battus, tués et génération après génération, les classes dirigeantes ont compris que les répressions ne suffisaient pas et, comme Bismark dans les années 1880 en Allemagne ils ont mis en place des réformes contre-révolutionnaires pour détruire le mouvement socialiste et protéger le capitalisme. Gabriel Kolko, éminent historien, illustre très bien ces réformes dans son livre « The Triumph of Conservatism : A reinterpretation of American History » (The Free Press of Glencoe, 1963). On parlait des femmes précédemment, le droit de vote des Femmes, gagné en 1919 a été une réforme progressiste. Les féministes ont voulu une révolution sociale et pas uniquement le droit de vote. Ce n’était rien par rapport à ce qu’elles voulaient comme le droit de divorcer pour les femmes, le droit à la propriété privée, le droit à l’éducation… En 1919, les femmes ont voté selon la volonté de leur mari.

-  Ces réformes n’ont pas empêché la répression sur le terrain des mouvements ouvriers ?

La répression et la récupération ont servi à mettre en place une idéologie de l’individualisme. Un économiste marxiste a conclut que cette idéologie fut pire que le racisme ou le sexisme car celle ci a complètement désarmé et isolé l’individu. C’est un sabotage et ça empêche toute défense et contrairement au racisme et au sexisme, il n’y a aucun moyen de résister.

-  Il y a les réformes, la répression mais il y a aussi les briseurs de grèves : les « scabs », en français, « les jaunes ». D’où vient cette expression ?

De Jack London. « Scab » signifie croûte. Après une blessure, il y a une croûte qui se forme et ce n’est pas très beau comme les briseurs de grève. Pendant les grèves, on disait que c’était illégal d’utiliser le mot « Scab ». .

-  Malgré tout ça le mouvement ouvrier arrive à faire entendre sa voix au niveau des revendications sociales. Comment cela a-t-il évolué dans les années 70, 80 et 90 ?

Il existe en France une tradition du centralisme démocratique avec les partis et ses élites qui ont le devoir d’informer les membres. Il n’y a pas la même culture politique aux Etats-Unis, on se méfie des élites. Les dirigeants de syndicats, comme Jimmy Hoffa ou Tony Boyle, sont devenus bien payés pour ne rien faire. La corruption régnait... C’étaient des opportunistes qui ne servaient pas l’intérêt des ouvriers. A l’origine des syndicats, c’est le besoin de servir les intérêts du petit peuple. C’est lui qui milite, organise une structure syndicale et institutionnalise la lutte des classes. Une fois que c’est institutionnalisé, le dirigeant peut devenir opportuniste et être tenté par les avantages, collaborer avec les structures dirigeantes, avec l’ennemi dans un esprit contraire aux intérêts des ouvriers. En faisant beaucoup de compromis, ils se sont éloignés des ouvriers.

-  Quel est l’état du syndicalisme actuellement ? Est-ce que les voix des ouvriers ont du mal à se faire entendre ?

Une nouvelle vague de dirigeants a invité d’autres minorités : noirs, féministes, gays à entrer dans les syndicats et militer pour les réformes sociales. Ils ont eu l’intelligence de revitaliser les syndicats en laissant les gens suivre leur désir d’indépendance et de justice et la jeunesse a été invitée. Le problème, c’est que le syndicat est une institution qui a des traditions, qui est souvent autoritaire et introduire des gens est vraiment un effort de changer l’institution mais cela prend du temps. Il existe une compétition entre syndiqués et non syndiqués et ils ne voient pas les problèmes de l’économie politique, les problèmes sociaux comme un tout, un ensemble. L’institution a été créée pour les besoins du peuple et c’est les syndiqués qui ont la possibilité de pousser la culture syndicaliste vers une culture révolutionnaire plutôt que vers une culture opportuniste.

-  Est-ce que la société américaine peut encore intervenir sur les différentes formes de régression sociale. Est-ce que cela peut changer par la forme des syndicats ?

On ne peut pas prévoir les changements. On est dans une période qui ressemble aux années 30. La crise veut dire le manque de travail, de salaires, d’opportunités, de liberté de choisir le métier que l’on veut ou d’avoir une éducation. Mais pour l’élite, c’est l’opportunité d’investir et en retirer du profit. Mais c’est de plus en plus difficile de trouver les investissements qui permettent de créer un profit respectable pour les actionnaires. On est dans une situation où les classes moyennes, ouvriers et employés qualifiés, techniciens… sont entrain de voir leur salaire baisser, leur pouvoir d’achat diminuer. On est dans une crise capitaliste où la consommation n’est pas encouragée c’est à dire dans un nouvel état où les grands actionnaires, comme Bill Gates, ne peuvent dépenser en 100 vies, ce qu’ils ont gagné. On se demande pourquoi ces gens tellement riches ne peuvent pas distribuer leur richesse afin que la jeunesse puisse s’acheter une maison, une voiture… Pourquoi appauvrir la jeunesse ? Mais ces actionnaires préfèrent investir dans l’industrie militaire ou spatiale, plutôt que dans une industrie qui produit des biens de consommation. Ces milliards de dollars sont utilisés pour protéger les dollars qu’ils possèdent. Les investissements militaires sont devenus les seuls vraiment rentables !

-  Propos recueillis par Loïc Chusseau.

Francis Feeley : bibliographie

FRANCIS FEELEY a créé et dirige le centre de recherche CIESIMSA de Grenoble. Il enseigne l’Histoire sociale des Etats-Unis et de la France dans l’enseignement supérieur français et américain. Il est l’auteur de America’s Concentration Camps During World War II : Social Science and the Japanese American Internment (University Press of the South, 1999) préfacé par Howard Zinn, de The Wisdom to Know the Difference, Conversations with Residents of Three Cities : San Francisco, CA, Paris, France, and Minsk, Belarus (World Heritage Press, 1998) et A Strategy of Dominance : History of an American Concentration Camp in Pomona, California (Brandywine Press, 1995), et d’essais, parmi lesquels Pensée unique, assiette unique : la stratégie mondiale de McDonalds.

Rencontre avec les Hurlements d’Leo

Publié le 1er juin 2004

Gildas Le Tousse


Violon, sax, trompette, trombone, guitares, basses, batteries et l’indispensable accordéon. On the road Eugène, vla les Hurlements de Léo pour la sortie de leur 3ème album et qui chaufferont les festivals de l’été avec une tendance punk caravaning et chanson swing. En couleurs et en paroles vla la première interview d’un nouveau journaliste fragil !

Avant de commencer, je tiens à te préciser que je suis interviewer débutant donc je n’ai pas beaucoup d’expérience dans le métier…

Laurent Kebaus : C’est pas grave, il n’y a pas de souci…

-  Bon ok, c’est parti alors…Est-ce que tu peux me parler du parcours professionnel des Hurlements d’Léo ?

LK : Au départ de l’aventure, en 1995, le groupe était formé de 3 personnes : Erwan au chant et à la guitare, Zebulon à la contrebassine et moi au chant et à la guitare. On a débuté à Bordeaux, notre ville d’origine, dans les bars et dans la rue ; le but dans un premier temps, c était surtout de pouvoir se faire payer des coups et gagner un peu d’argent accessoirement (rires…).

Trois ans après nos débuts dans la rue, on a sorti un 1er album intitulé « Le café des jours heureux » en autoproduction évidemment et distribué par PIAS. Ce premier pas dans l’univers musical "professionnel" nous permet d’enchaîner les petites salles de concert et de faire promouvoir notre album à travers les rencontres avec le public.

En 2000, on multiplie les concerts pour arriver à un total d’environ 250 concerts ; dans la même année, on sort notre 2e album « La belle affaire » toujours distribué par PIAS.

On arrive alors en 2002 où on monte le collectif « Un air 2 familles » avec la participation des Ogres de Barback. Cette réunion musicale d’univers proche a débouché sur une tournée européenne d’un an appelée Latcho Drom qui signifie en langue tzigane « bonne route ». On a donc joué en Belgique, en Allemagne, en Roumanie, en Pologne et en Suisse.

En 2003, Octobre pour être précis, on change de maison de disques pour aller chez WAGRAM ; les causes ? : on voulait trouver des gens plus motivés professionnellement et aussi d’un point de vue humain, ça se passe mieux… Entre Octobre et Décembre de la même année, on enchaîne 50 concerts à travers la France puis entre Février et Mars, on est parti en Australie pour découvrir des nouveaux horizons musicaux, une autre culture et puis pour bouger…Enfin on arrive en Mai…

-  Par rapport à Mai justement, est ce que tu peux m’en dire en peu plus sur la rencontre avec les « 17 Hippies » et la tournée qui a suivie ?

LK : Les 17 Hippies, on les a rencontré lors de la tournée Latcho Drom…Ce sont eux qui nous ont accueillis à notre arrivée en Allemagne et qui nous ont aidé à monter le chapiteau…On a joué avec eux et il s’est avéré qu’on s’est bien entendu dès le premier contact. On a alors trouver l’idée sympa de pouvoir se retrouver pour créer un collectif musical entre les 2 groupes.

Comme ils sont originaires de Berlin et que l’allemand, ce n’est pas notre point fort, on communique plutôt en anglais. Heureusement que certains des « 17 Hippies » sont bilingues…

La tournée Hardcore Troubadors a commencé début Mai mais les répétitions se sont effectuées 1 mois avant où on les accueillis à Bordeaux. Pendant tout le mois de Mai, on voyage à travers la France pour se produire sur scène et la tournée prend fin le 31 Mai ; date à laquelle sortira le disque en studio des Hardcores Trobadors (distribution nationale, c’est important ça !).

Pour planter le décor, les Harcores Trobadors, c’est 20 personnes sur scène qui enchaînent 2h30 de concert…Sachant que l’univers musical des 17 Hippies se concentre plus dans la musique de l’est, le folklore divers et la world music, on a procédé à des arrangements musicaux entre les 2 groupes, on a aussi fait des reprises de chacun des groupes, il y a aussi des compositions et on tourne sur la scène pour qu’il y ait un peu de passage et que l’ensemble des musiciens se reposent l’histoire d’une ou deux chansons.

-  Une petite dernière pour la route, comment est ce que vous définissez votre style de musique ?

LK : Pourquoi faut il toujours donner une désignation à un style de musique ? Le fait de donner un nom à un style, ça l’enclave, c’est-à-dire que ça instaure des barrières au groupe et qu’il est jugé sous telle catégorie.

A travers nos 3 albums, il y a quand même eu une évolution tant au niveau du style que des textes : le troisième tend vers une consonance plus rock alors que le 2e était plus mélancolique. C’est pour ça qu’on préfère rester large en définissant notre style comme « chanson punk caravaning ».

Le punk, c’est surtout pour la démarche : on a appris sur le tas à jouer les instruments et même pendant les concerts. Le caravaning, ça fait plus référence au fait que le groupe se nourrit des voyages et des rencontres pour étoffer notre diversité musicale et culturelle.

Certaines personnes jugent que notre musique est festive, pourtant en écoutant les paroles, les chansons appartiennent plutôt à un univers poétique et nostalgique ; la festivité, elle est créée et partagée grâce à l’alchimie entre les textes, le public et nous.

-  Merci pour l’interview et bon concert... (ça va, j’étais pas ridicule ?)

LK : De rien…Pour l’interview, ne t’inquiètes pas, j’ai connu pire et c’était des professionnels…

Discographie

-  1998 : Le café des jours heureux
-  2000 : La belle affaire
-  2002 : Un air 2 familles avec Les Ogres de Barback (Live)
-  2003 : Ouest terne
-  juin 2003 : Maxi 6 titres Hardcore Trobadors
-  2004 : sortie nationale disque Hardcore Trobadors

Interview : Gildas Le Tousse

Combattons pour la diversité culturelle !

Publié le 21 mai 2004

Pascal Couffin


La culture sur le point d’être privatisée. Les industries culturelles contrôlent l’ensemble de la chaîne : de la création àla distribution. Alors que l’offre de produits culturels est de plus en plus élevée, une infime partie est consommée. Pourquoi ?

Vers la marchandisation de la culture

A la fin des années 90, lorsque le cycle de négociation de l’Uruguay Round s’acheva, un immense champ s’ouvrit aux 120 pays membres de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce). Pour l’OMC, tous les secteurs de la vie humaine peuvent être déréglementés et libéralisés. Le secteur culturel a, lui, bénéficié d’un sursis de deux fois cinq ans et c’est à ce moment là que l’on a commencé à parler d’exception culturelle. Ce n’était pas une invention langagière de M. Jean Marie Messier, alors patron de Vivendi-Universal !

Désormais de nouveaux enjeux apparaissent, comme la volonté d’élargir le droit de la propriété intellectuelle à de nouveaux champs. Une anecdote mérite d’être signalé : les Etats-Unis avaient refuser d’adhérer au Copyright en 1891 pour des raisons de diversité culturelle afin de lutter contre l’impérialisme anglais et français. Un siècle plus tard, les rapports de force se sont inversés.

Concentration de l’industrie culturelle

Depuis quelques années, on constate une très grande abondance des produits culturels mais elle fait face paradoxalement à une grande concentration de la consommation. Pour le secteur musical, 5% des disques représentent 60% des ventes. Même logique quant à la diffusion en radio. Selon une enquête du Figaro Entreprise du 10 janvier 2003, le nombre de passages radio de Jean Jacques Goldman à été de 37200 passages (soit plus de 100 par jour !)

Désormais, l’industrie culturelle est extrêmement concentrée. Ainsi pour l’industrie du disque, 4 majors détiennent 80% de la production. Ces multinationales, nous les connaissons tou(te)s, il s’agit de Time Warner, Viacom, Disney, NBC-Universal, Newscorp, Sony et Bertelsman. Elles possèdent aussi bien le contenu que les structures qui aide à promouvoir leurs produits culturels : agence marketing, chaînes de distribution, presse… La distribution a, elle aussi, connu la grande concentration.

L’intérêt d’un grand groupe à détenir 80% du marché est d’accélérer la rotation des produits à la vente. Ils n’ont donc plus le temps de s’imposer, tout est joué avant même la sortie en magasin par les politiques de promotions et de marketing. Un groupe comme Lagardère dans l’édition du livre peut définir le livre qui va faire un carton car il détient la chaîne d’un bout à l’autre : de la création à la vente. Standardisation et formatage sont de mises.

A côté de ces mastodontes, subsistent de nombreux indépendants qui malgré la vague de concentration, voient leurs produits augmenter. Mais seule une partie de cette offre de produits culturels est offerte à la consommation puisque ces biens de consommation n’ont pas la chance d’être placé en tête de gondole voir même de pénétrer les rayonnages des grands groupes de distribution. Le marché interdit à ces maisons indépendantes d’être présentes dans les grands lieux de diffusion. La censure est désormais économique. Alors qu’il existe 3500 éditeurs en France, on ne parle que de 200 !

Beaucoup de produits culturels, peu de demande

Le phénomène de concentration n’a donc pas réussi à entamer l’offre. L’inverse se produit même, puisque lors de chaque rentrée littéraire, le nombre de livre va croissant et c’est pour ces raisons qu’il a été décidé d’étaler les sorties sur l’année. Le problème vient donc des consommateurs qui ne s’intéressent (ou plutôt ne peuvent s’intéresser) qu’à une très petite partie du catalogue. Comme chacun sait, la politique de l’offre en matière culturelle ne suffit pas à élargir la demande.

Un réel apprentissage est donc nécessaire afin que le consommateur détienne les clés de la culture. Plus la curiosité grandit, plus la demande devient naturelle et l’intervention publique via la médiation culturelle se réduit. Malheureusement, l’émancipation du consommateur est loin d’être acquise. Nombre de prescripteurs, tels les médias, agissent sur son opinion et le conditionne à acheter une faible partie des produits culturels disponibles. La véritable réflexion qui doit être mener, est de définir notre rapport à la culture.

Une intervention publique nécessaire

L’intervention publique est donc primordiale. Sans elle, point de diversité culturelle. Aussi l’interdiction d’accorder des subventions aux entreprises culturelles au nom de l’OMC est un danger ! Si une telle mesure venait à s’exercer, on assisterait inévitablement à la réduction de l’offre culturelle. Le réseau de cinéma Europa a ainsi bénéficié de subventions de la part de l’Union Européenne afin de diffuser des films exceptionnels et leur laisser le temps de trouver un public. La réussite a été au rendez-vous, le goût du public s’est développé.

Les combats sont devant nous. Une ébauche de solution se dessine à l’horizon si elle est suivie d’une réelle volonté politique. La culture ne pèse pas un grand poids dans l’univers néo-libéral, aussi un des enjeux, est de faire en sorte que la culture ne soit pas l’objet d’une négociation à l’OMC. Pour cela il faut un texte, actuellement en préparation à l’UNESCO. A suivre…

Un autre regard à360° sur la ville

Ouverture de la Tour du Lieu Unique

Publié le 14 mai 2004

Pascal Couffin


La délicieuse Tour du Lieu Unique se découvre totalement et offre aux Nantais fiers du passé industriel de Nantes une vision panoramique à360° sur la ville. Un autre regard possible grâce àune machine fantasque que l’on croirait pensée par Jules Verne ou conçue par le Royal de Luxe.

Décors kitsch 1900, du début de siècle où un industriel nantais n’hésita pas à faire construire à la proue de ses usines de p’tits LU deux glorieuses tours, où la silhouette de la Renommé souffla dans la trompette de la réussite. Puis les évolutions industrielles des années 80 sonnent le glas des tours. LU déménage et intègre une usine flambant neuve. Reste aux nantais, l’image des deux tours et l’odeur des biscuits. Sur les deux tours, une sera sauvegardée mais scalpée. Elle ressemblera longtemps à un long fût avant que l’architecte Jean-Marie Lépinay reconstitue la façade en 1998, puis Patrick Bouchain commence l’installation du Lieu Unique dans le reste de l’Usine.

Le gyrorama

Promises depuis quelques temps, l’ouverture de la tour au public se faisait attendre. Désormais elle est presque accessible à tous moyennant une participation au frais de 2 euros (sic !), le prix d’une vision à 360° sur la ville de Nantes au moyen du « gyroramama ». Une bien curieuse machinerie dont Jean Marc Ayrault, lors de l’inauguration, a tourné la manivelle qui fait pivoter la plate-forme. Deux artistes plasticiens de l’agence Concept Plastique ont conçu ce dispositif qui permet aux visiteurs d’embrasser du regard la cité des Congrès, le Château des Ducs, la cathédrale, la gare ferroviaire. L’intervention est sobre, l’intérieur du dôme est habillé de noir et tatoué de blanc par quelques logos de la marque de biscuit.

Cheminement vertical

L’on rêve de folles nuits agitées dans ce phare et voir sous nos pieds les lumières de la ville. Mais pour l’instant lors du cheminement vertical vers le sommet de la tour, on se contentera d’une vidéo qui raconte l’histoire du lieu dans un devoir de mémoire pour relier le présent au passé. Un commentaire d’une ancienne employée de l’Usine invitée lors de l’inauguration et ne connaissant pas le Lieu Unique de s’exclamer « quelle horreur » en découvrant la réhabilitation de ce qui était son usine mais qui est devenu un lieu culturel qui se veut ouvert à tous !

-  La tour est ouverte du mercredi au samedi de 13h à 19h, le dimanche de 15h à 19h. Tarif individuel : 2 euros.

Uneven - Nouvel album U

Publié le 20 avril 2004

Mathieu Sonet


En ce frais mois de Janvier, Uneven secoue la scène du Forum de Vauréal : deux guitares et une section rythmique derrière les micros pour un power-rock bruyant parcouru de riff électrifiant. Prestation prometteuse et rebelote en showcase àla Fnac Cergy le mois suivant, où le groupe fait trembler les murs et vibrer le public présent, dans un salon àpeine plus grand qu’un studio d’enregistrement, mais avec toujours autant d’énergie àrevendre…

Uneven, c’est d’abord quatres musiciens franciliens issus de différents groupes énervés et se retrouvant dans une mouvance commune. L’influence de départ : le rock indé américain, qu’il soit pop, hardcore ou métal (Sonic Youth, Pixies, Fugazi, Les Thugs...) Le style du groupe se cristallise alors autour de deux éléments fondamentaux : un son puissant évidemment, mais toujours accompagné d’une ligne mélodique marquée.

Un premier cinq titre autoproduit est enregistré fin 1999 sur leur label Sushiprod, qui suscite rapidement l’intérêt de la presse musicale spécialisée. Le succès se manifeste également par l’achat d’une de leur chanson par Sony Computer Entertainment pour la bande jeu vidéo "Le Monde Des Bleus 2002". Grâce à cette collaboration le groupe peut financer son label et son développement sans avoir à attendre qu’une maison de disque daigne se pencher sur leur cas. Récidivant avec la bande son du "Monde Des Bleus 2003", le groupe passe enfin à l’enregistrement d’un album en 2003.

L’album U disponible depuis le 2 Mars a été entièrement auto-produit, avec des prises s’étalant de Mars à Juin 2003, et a bénéficié du mixage de l’ingénieur du son Antoine Gaillet (Wampas, Pleymo...).

Votre approche de la composition ?

Jérémie (guitare, chant) : "Au départ il y a une idée, un gimmick, ça peut être un plan basse ou batterie, un riff à la guitare. Au fur et à mesure des répétitions les morceaux se construisent ensuite par l’ajout de couches successives, chacun apporte un petit morceau. Ajoutons un peu de hasard et un peu d’intuition... Le chant, en anglais exclusivement, n’est ajouté qu’à la fin. Nous nous attachons moins à la signification qu’à la musicalité, nous ne sommes pas vraiment un groupe à texte... La priorité c’est l’énergie qu’on veut transmettre."

Votre indépendance ?

Jérémie : "Elle découle de l’autoproduction. Aujourd’hui on n’a plus vraiment le choix. L’auto-production s’est imposée pour permettre de faire vivre notre musique. C’est du travail en plus évidemment, la promotion et la distribution par exemple, et nous avons toujours nos boulots en parallèle. Mais nous préférons que la musique reste un plaisir. La vente de chansons à Sony et le soutien entre autre de la FNAC Cergy nous permettent d’avancer."

Extrait de l’album U "Wish Not To See You" dispo sur le sampler de Rolling Stone d’Avril 2004

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