Publié le 12 février 2005

Charlotte Houang


Guennadi Sidorov, réalisateur, acteur, scénariste et producteur, est venu présenter, àl’occasion de la neuvième édition du Festival du Cinéma Russe, son premier long métrage Les petites vieilles. Le film a été acclamé par la critique lors de sa sortie en France en 2003.

Après des études à VGIK (Institut National de la Cinématographie) à Moscou, Guennadi Sidorov obtient, en 1986, son diplôme d’acteur puis de réalisateur en 1990. Depuis cette date, le réalisateur, est directeur général des studios Sidorov & fils et préside depuis 1995 la direction de la Fondation générale du soutien de l’art cinématographique. Il réalise, avec Les petites vieilles, son premier long métrage après un premier court métrage en 1990 La nuit. Guennadi Sidorov est marié à Larissa Sadilova, qui a notamment réalisé le film dramatique Happy birthday.

Briser un tabou

Sidorov signe une comédie truculente qui manie humour et dialogues osés sur des problèmes graves comme l’intégration et le racisme. « J’espère avoir fait réfléchir les gens sur certains problèmes dans le pays ». Le réalisateur n’hésite pas à briser le tabou de la vieillesse en démontrant qu’on peut rire, boire et draguer après 70 ans...

Ce film s’inscrit dans une tendance actuelle du cinéma russe qui penche vers le documentaire. Le scénario s’inspire d’une expérience du réalisateur qui a vécu plusieurs années à Baluba, une région peuplée de réfugiés tchétchènes. Il aborde ainsi le problème de l’accueil des étrangers en Russie et émet même la possibilité d’une guerre civile. « Les russes ne facilitent pas vraiment l’intégration des étrangers ». Sidorov souligne l’incompréhension qui peut exister entre deux cultures et fait le choix de ne pas sous-titrer les dialogues en ouzbèke. « Je voulais que le spectateur ressente la même irritation que les petites vieilles lorsque les réfugiés débarquent dans leur province. »

Ce premier long métrage a reçu huit récompenses en France dont le grand prix du Festival du Premier Plan d’Angers. La performance réside dans la distribution, la plupart des petites vieilles n’étant pas des actrices professionnelles, hormis Valentina Bezroutskaïa qui a reçu un Nika, l’équivalent des Oscars en Russie. Guennadi Sidorov interprète avec 20kg superflus le rôle d’un militaire alcoolique qui vient se ravitailler en vodka chez les petites vieilles. Un rôle qui n’a pas été choisi au hasard puisque son père exerçait cette profession.

Critiques russes

"Certains ont pensé qu’il s’agissait d’un « film musulman », anti-russe. D’autres au contraire parlent d’un film anti-musulman", rapporte le réalisateur visiblement amusé par les diverses interprétations. « Une petite couche de la population russe semble avoir compris que c’était un film unificateur... » Le film n’est en tout cas jamais diffusé en première partie de soirée sans doute à cause des dialogues un peu osés...

Guennadi Sidorov ne compte pas s’arrêter en si bon chemin et travaille d’ores et déjà sur son prochain film Les Joyeux Soldats qui évoquera, avec un second degré affiché, les souffrances du peuple russe ainsi que les difficultés rencontrées à redresser la tête après la guerre.

Charlotte Houang & Nathalie Landais