Publié le 10 janvier 2006

Noemie Lehouelleur


L’avant-dernière création du Centre Chorégraphique National de Nantes, La Mélancolie des Profondeurs, sonde les tréfonds de l’âme tourmentée du maître de la Renaissance italienne, Michel-Ange.

La Mélancolie des Profondeurs est l’enfant né des retrouvailles de Claude, le chorégraphe, et de Brumachon, le peintre. Le directeur du CCNN renoue avec ses premiers amours en esquissant le portrait du génie de la Chapelle Sixtine. Il se fait assister dans cette tâche titanesque par l’ensemble vocal A Sei Voci, immergeant ainsi son public dans l’atmosphère mystique et feutrée de la Renaissance et du Baroque.

A tour de chant, le corps des danseurs réincarnent les mains noueuses et l’esprit torturé de l’artiste, leurs soubresauts trahissent ses doutes, leurs mouvements vaporeux puis brutaux, son humeur lunatique, ses contrariétés, ses épreuves. La chair se fait glaise et se laisse façonner et malmener au gré des joies, des caprices et des démons qui assiègent l’Ange. Le cœur de la troupe palpite au rythme de la mesure psalmodiée par A Sei Voci, bercé par les messes de Josquin Desprez. Dans le tableau final, voix et corps ne forment plus qu’une matière indissociable et atteignent l’osmose et la plénitude tant recherchées par le maître.

Mélancolie, parce-ce que l’itinéraire de Michel-Ange est tortueux et épuisant, profondeurs, car l’abîme du tourment artistique est incommensurable. Mélancolie des Profondeurs parce-ce que l’on peut s’approcher de la perfection mais jamais l’atteindre.

Claude Brumachon ose impudiquement lever le voile sur la fêlure d’un être humain en proie à une quête insatiable et éternelle de l’absolu, de la perfection, du sacré, de Dieu.

Noémie Lehouelleur