Publié le 30 novembre 2005

Mathilde Clemot


Pour les fêtes de fin d’année, c’est un opéra bouffe àla française fort appétissant que nous prépare Angers Nantes Opéra ! Après Les Joyeuses Commères de Windsor de Nicolaï en 2003 et Le Nez de Chostakovitch en 2004, c’est L’Étoile, d’Emmanuel Chabrier qui fait cette année office de « spectacle de fin d’année  ».

Dépoussiérons l’opéra !

Nous entraînant à la fois dans la fantaisie, la loufoquerie, l’absurde et la poésie, cette « Etoile » de Noël s’annonce belle et filante, droit dans la lignée de ces opéras surprenants par leur modernité. L’opéra nous paraît trop souvent inaccessible, ringard, désuet, incompréhensible, trop classique, trop statique, réservé à une élite car tout le monde n’a pas une oreille de musicologue, ou même de quoi investir dans une place au parterre !!! Il est bien temps de dépoussiérer toutes ces idées reçues et en profiter pour découvrir une version très actuelle de L’Etoile, d’Emmanuel Chabrier.

Cette œuvre de la fin du XIXè siècle est méconnue et rarement montée. Mais c’est avec une mise en scène audacieuse et pétillante qu’Emmanuelle Bastet veut nous la faire découvrir : elle a choisi de transposer le royaume imaginaire du roi Ouf Premier (voilà qui en dit long) dans un grand magasin des années cinquante ! Ce roi despote, organisateur d’exécutions publiques, devient donc un grand patron tyrannique, martyrisant ses employés et espionnant ses clients. Cherchant avidement sa nouvelle victime, il croise un jeune colporteur, Lazuli, qui, de mauvaise humeur, le gifle. Fou de joie, Ouf le condamne à mort, mais son astrologue lui apprend que sa propre vie et celle de Lazuli sont étroitement liées : si l’un meurt, l’autre meurt aussitôt... Nous voilà embarqués dans une multitude de retournements de situation et de quiproquos qui se prêtent à une folle et délicieuse mise en scène singeant la ronde des vendeurs et des clients de nos « empires modernes ».

Un véritable marathon vocal

Les librettistes ont repris une histoire écrite par Verlaine, grand ami de Chabrier. Ce dernier signe ici une œuvre légère, comique mais empreinte de finesse et d’élégance ; la musique, très belle, paraît simple, mais il n’en est rien, elle est complexe, riche, et il s’agit pour les chanteurs de courir un véritable marathon vocal. La distribution, jeune et francophone, tout comme Emmanuelle Bastet, metteur en scène, et Laurent Campellone, chef d’orchestre, crée une homogénéité quasi idéale pour une création. La complicité de l’équipe ne manquera certainement pas de s’en ressentir sur scène, apportant ce petit « supplément d’âme » que l’on regrette souvent de ne pas trouver dans les opéras, montés dans des délais très courts.

Avec des places à cinq euros minimum (eh oui ! on ne voit pas toujours bien mais pour le prix on ne va pas rechigner), on aurait tort de se priver de cette Etoile qui sera à Nantes au théâtre Graslin les 9, 11, 13, 15 et 17 décembre, et à Angers au Grand Théâtre (un peu plus cher) les 28, 30 et 31 décembre.

Mathilde CLEMOT

P.-S. Séance de rattrapage pour ceux qui n’auront pas la chance de pouvoir la voir en direct, L’Etoile sera enregistré et retransmise le 14 janvier sur France Musique.