Publié le 2 avril 2009

Emilie Friedlander

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Y a-t-il quelque chose dans l’eau de Ridgewood, New Jersey, ou bien l’“État jardin” n’est-il que par hasard le berceau privilégié de nombreuses et extatiques tentatives psychédéliques ? Tout comme son voisin d’enfance et collaborateur au long cours Matt Mondanile (Ducktails, Predator Vision, Real Estate), Julian Lynch y fait fructifier plus d’enregistrements de qualité que l’on ne peut en digérer. Sa sonorité, un patchwork de voix, de guitare wah-wah, de basse, de batterie et d’effets de synthés kitschs, porte l’insouciance caractéristique des productions de Ridgewood dans le domaine du songwriting.

Les huit chansons d’Orange You Glad (Buffalo Songs), son album auto-produit le plus récent, n’ont pas peur d’être jolies, pas plus qu’elles ne se soucient d’avoir quoi que ce soit en commun avec des “chansons”. Ceci dit, les esquisses somnolentes de Lynch semblent toujours avancer malgré elles, aussi surprises que nous par les sursauts mélodiques gracieux auxquelles elles donnent parfois naissance. Des rythmes de tablas synthétiques y flirtent librement avec des cornemuses de Saint-Patrick et des passages de pop baroque des années 60, devinant parfois nos attentes et les matérialisant en refrains que l’on se surprend à fredonner. Tous les éléments du mélange (percussions et tablas inclues) semblent être englués dans une épaisse couche de mélasse, et se battre pour rester dans la course musicale, mais finissent toujours, on ne sait trop comment, par atterrir exactement où ils doivent.

Do It Yourself. Fais-le toi-même, à maison, avec un micro d’ordinateur pourri. La musique de Julian Lynch est un exemple frappant de ce que l’on peut faire avec de bonnes idées et des moyens limités. Orange You Glad tire tous les avantages des caractéristiques de l’enregistrement low-fi, permettant aux riffs brûlants et à la voix de fausset nasale à la John Lennon de Lynch de se dissoudre dans une variété de textures sourdes. Encore une fois, difficile de deviner si Lynch s’en remet au hasard, tel un joueur, ou compose avec la méticulosité d’un prestidigitateur. Mais quand un saut dans le mixage final ramène le refrain d’une chanson dans un crescendo phénoménal, on ne peut qu’être ravi d’attraper le train en marche.

Emilie Friedlander

Traduction : Sophie Pécaud

-  Version originale publiée dans Foxy Digitalis.