La copie juste contre le copyright
Cory Doctorow aux Utopiales 2006
Cory Doctorow est un écrivain américain assez particulier. Il a été le premier à publier gratuitement un roman sur Internet en 2003. Ce journaliste-bloggeur-auteur de SF était à Nantes début novembre, aux festival des Utopiales. Rencontre.
Au pays du prix Goncourt et de Bernard Pivot, on a encore du mal à imaginer lire un roman...sans livre. Cory Doctorow, 35 ans et originaire de Toronto, a été un pionnier en la matière. En 2003, il publie gratuitement sur le Net son roman Down and Out in the Magic Kingdom sous la licence Creative Commons, qui permet la copie et la distribution des œuvres sans risque de poursuite judiciaire.
Le copyright est justement l’objet de sa venue aux Utopiales où il donne une conférence à ce sujet. Activiste, il est convaincu de l’absurdité d’un copyright excessif.
« Le copyright, c’est un monopole qui a tendance à entraîner des concentrations. Désormais, dans le domaine artistique, on a 3 ou 4 compagnies qui contrôlent la musique, et autant pour le cinéma et l’édition... D’une certaine manière, c’est comme un retour au mécénat, l’ancêtre du copyright, lorsqu’un artiste ne pouvait exercer son talent qu’avec l’appui des puissants, et pas autrement. Le pape ou le PDG d’Universal, c’est du pareil au même. »
Le pape ou le PDG d'Universal, c'est du pareil au même.
Son baladeur mp3 à portée d’oreilles, il voit le Web comme une chance pour l’Art. « Avec des coûts de distribution très bas, Internet permet à un plus grand nombre de personnes de participer aux pratiques artistiques. L’offre s’en trouve considérablement augmentée, ce qui permet de satisfaire différents publics. »
Le "cauchemar" français
Niveau « copyright à toutes les sauces », la France n’est pas en reste, avec la fameuse loi DADVSI (Droit d’Auteurs et Droits Voisins dans la Société de l’Information) qui légalise les DRM. Ces "Digital Rights Management" sont des programmes installés dans les CD et DVD qui limitent la copie et assurent des monopoles (impossible de lire des morceaux achetés sur iTunes si vous n’avez pas d’iPod !). Cory Doctorow a bien suivi l’affaire : « DAVDSI aurait pu être une bonne loi, mais le gouvernement français a plié devant Apple et Vivendi, et la loi préserve les monopoles. Les législateurs français pouvaient s’inspirer de la catastrophique loi américaine similaire, mise en place en 1998, mais au lieu d’en tirer des conséquences, ils ont répété les mêmes erreurs, et en ont même fait de nouvelles ! C’est un cauchemar... »
Les fans à l’honneur
Fidèle à ses convictions, Doctorow est allé jusqu’à autoriser les fan-fictions autour de son œuvre, permettant ainsi à ses admirateurs de reprendre son œuvre. « Ma première histoire, je l’ai écrite à 6 ans, et c’était sur Star Wars. J’ai commencé par des fan-fictions, comme beaucoup de jeunes. Dans les conventions de SF, des fans reprennent des chansons célèbres, comme par exemple ‘Like a Virgin’de Madonna pour parler de leur nain dans Donjons et Dragons. Et Madonna n’en sait rien, tant que ça reste entre fans pendant les conventions. Mais dès que ça se retrouve sur le Net, les règles changent, et on passe de la culture au commerce. Ça devient aussi illicite que reproduire illégallement des albums pour les revendre au marché noir. Autoriser les fan-fictions, c’est une manière de dire aux fans de continuer ce qu’ils ont toujours fait. »
Question bête de votre serviteur à l’issue de l’entretien : « Comment un auteur peut-il dédicacer des ouvrages non publiés ? ». Réponse de l’intéressé : « Oh, mais je signe un tas de clés USB ! ». Evidemment !
Alexandre Hervaud
[Le blog de Cory Doctorow, avec ses romans : www.craphound.com
Plus d’infos sur les DRM : http://stopdrm.info/
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